La crise sanitaire que nous traversons depuis plusieurs mois déjà vient plus que jamais conforter la logistique parmi les classes d’actifs les plus résilientes. Partie intégrante de la Supply Chain, elle a su répondre présente afin d’assurer la continuité commerciale et industrielle de l’activité des sociétés. La fermeture des frontières internationales a également montré du doigt les limites de la globalisation et du transport international. Avec les problèmes de transports liés à la crise du COVID-19, de nombreuses lignes de productions étaient à l’arrêt. Tout le monde a ainsi pu constater l’importance d’une logistique fonctionnelle et opérationnelle localement qui s’est révélée indispensable pour des secteurs stratégiques comme la santé ou l’alimentation. L’approvisionnement des magasins, pharmacies et autres commerces de proximité dans des délais particulièrement courts en est la parfaite illustration. La logistique s’est donc révélée aux yeux du grand public comme un élément majeur de la vie économique du pays.
Le secteur logistique connait naturellement depuis quelques années un intérêt renouvelé de la part de nombreux investisseurs très variés, qu’ils soient français ou internationaux. Le marché français présente de solides fondamentaux et est très apprécié pour sa profondeur. Sur les trois dernières années nous sommes sur une moyenne annuelle supérieure à 4 millions de m² en transactions utilisateurs. Il y a une montée en puissance des volumes investis en logistique avec un record constaté en 2019 de 4,8 milliards d’euros. Le premier trimestre 2020 a également été excellent en termes d’investissement, enregistrant plus 1,4 milliard. Avec la crise sanitaire, je pense même que l’engouement des investisseurs va être renforcé sur cette classe d’actif et constate qu’ils s’interrogent avant tout sur comment investir davantage…
Par ailleurs, la crise a été l’élément déclencheur d’une accélération de la demande sur le e-commerce alimentaire. Le retail a été négativement impacté avec la fermeture des magasins. La seule possibilité qui s’offrait au secteur pour écouler les marchandises et poursuivre le business était le e-commerce.
Cependant, la crise a intensifié le besoin de digitalisation des enseignes. L’association du retail et de la logistique s’est donc complexifiée notamment pour le secteur de l’alimentaire. Il a fallu approvisionner en matière de logistique urbaine les magasins de façon beaucoup plus régulière et intense. Nous observons que les commerces de proximité ont gagné en part de marché. Ils ont vu leur chiffre d’affaire grimper avec le confinement car les gens sont allés au plus près de leur domicile pour faire leurs courses. Le e-commerce alimentaire a logiquement dû se réinventer car il a fallu plus de marchandises, plus de volume et s’adapter à des livraisons sur des plages horaires beaucoup plus importantes.
Le rôle de l’immobilier logistique est central pour répondre aux enjeux du secteur. Selon moi, l’immobilier logistique accompagne le développement de la logistique au travers de différents phénomènes : l’effet de massification des stocks avec de très grosses plateforme XXL s’est renforcé depuis quelques années et l’optimisation des flux pour aller chercher la meilleure rentabilité possible.
Quand il y a massification des stocks et optimisation des flux, tout l’enjeu réside dans la façon de calculer le meilleur barycentre possible d’implantation au regard de la surface disponible et du bassin d’emploi. Pour que la logistique soit efficace il faut qu’il y ait une main d’œuvre qualifiée car tout n’est pas automatisé au sein des entrepôts logistiques.

J’observe un besoin en matière d’immobilier logistique sur de très gros entrepôts, mais également sur des entrepôts adaptés au e-commerce et à la logistique du dernier kilomètre, dont le chiffre d’affaire ne cesse de croître. L’organisation de process au sein de ces entrepôts passe par le développement de mezzanines. Par définition, le e-commerce représente une quantité de petites commandes conséquentes. Du fait du nombre important de références, il est possible de pouvoir travailler sur deux ou trois niveaux pour aller chercher le bon produit. Il faut que tous les produits soient présents et facile d’accès pour les magasiniers qui travaillent au cœur des entrepôts. On ne peut pas prendre un chariot élévateur pour aller chercher un robot cuiseur. Il faut que la marchandise soit à portée de mains. Il y a tout un process logistique qui s’est créé autour du e-commerce.
Je pense que les habitudes prises pendant le confinement vont être conservées. On devrait encore observer une augmentation du chiffre d’affaire du e-commerce dans les années à venir. Le e-commerce est naturellement un accélérateur de croissance pour le marché de l’immobilier logistique. Il faut donc trouver de la rentabilité dans l’outil logistique. Avec la concurrence du e-commerce, tous les grands distributeurs qu’ils soient alimentaires ou spécialisés ont repensé leur logistique pour lui apporter la meilleure efficacité possible.
La crise sanitaire va renforcer le besoin d’une logistique la plus verte possible, déjà amorcée, avec une empreinte carbone faible et plus adaptée. Ça passe bien évidemment par les bâtiments qui sont certifiés aujourd’hui, mais également par les flux. On se dirige davantage vers une logistique de proximité. La crise va avoir pour effet de donner un coup d’accélérateur à la logistique urbaine. Si les populations doivent davantage se faire livrer, nous allons naturellement nous orienter vers une logistique urbaine dans les grands centres de consommation avec des entrepôts adaptés, plus petits formats à l’entrée des villes comme en cœur de ville. Je pense que ça va être unes des évolutions majeures.
Les villes innovent, accompagnées par des acteurs privés à l’instar du Groupe Sogaris qui porte un projet industriel d’ampleur clair à l’échelle du Grand Paris comprenant des plateformes logistiques en entrée d’agglomération, des hôtels logistiques en cœur de ville, et des espaces de proximité en centre-ville.
Les bases devront être d’autant plus avancées que les villes vont réclamer des livraisons en véhicules propres. C’est déjà une tendance aujourd’hui, mais on s’aperçoit que c’est autant une logistique de flux que d’emplacements car on a du mal à trouver les bons sites pour la logistique urbaine, faute d’opportunités et faute de places. Aujourd’hui, il faut que la collectivité accepte de recevoir des entrepôts de tailles plus réduites aux portes des villes pour assurer cette logistique urbaine. Le sujet de logistique urbaine et de l’implantation d’entrepôts à l’entrée des villes pour assurer la livraison dans le centre urbain est vrai sur l’ensemble des grandes agglomérations que ce soit Lyon, Lille ou Marseille. Ce sont des décisions de politique d’aménagement. La livraison des marchandises en ville permet également aux populations de ne pas se déplacer avec la voiture. Il y a tout un équilibre à trouver. Il faut favoriser cette logistique urbaine beaucoup plus qu’elle ne l’a été jusqu’à présent.
L’optimisation de la supply chain constitue l’enjeu central du secteur. La crise a démontré l’importance d’avoir une reconstitution de certains stocks afin d’éviter des ruptures tant sur les lignes de production que sur l’approvisionnement de produits courants. De plus, assisterons-nous à une augmentation de la mécanisation et de la robotisation des entrepôts ? Ces dernières permettraient en effet à l’entrepôt, plus autonome de fait, de continuer à fonctionner si l’on rencontre d’autres crises similaires dans les années à venir. Tous les entrepôts ne peuvent pas avoir recours à une robotisation intégrale. La place de l’humain restera donc très présente. Robotisation et main d’œuvre qualifiée sont parfaitement complémentaires.
Plus que jamais, je tiens à souligner l’importance de la qualification de l’ensemble du personnel de la chaîne logistique qui va du Directeur Supply Chain, au responsable d’entrepôt, en passant par le préparateur de commande et le chauffeur routier, qui sont tous des ressources d’avenir !

Tribune signée
René Jeannenot, Directeur associé (MRICS) du Pôle Activité-Logistique France BNP Paribas Real Estate
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