Vincent Verdenne
Directeur du Développement, BNP Paribas Real Estate Valuation

Selon McKinsey Global Institute, le volume mondial de données double tous les trois ans. Cette croissance extraordinaire est notamment liée à l’essor des plateformes numériques ou encore aux 200 milliards d'objets connectés qui seront en circulation dans le monde d'ici à 2020 (Étude Intel). Ces chiffres impressionnants permettent de saisir combien la collecte, le stockage et le traitement de ces données représentent un élément-clé pour les entreprises et impactent l'ensemble de l'économie. Ainsi devenus essentiels à l'activité numérique, les data centers sont de plus en plus externalisés, formant une nouvelle classe d'actif immobilier. Zoom sur ce marché en croissance.

Quelle infrastructure pour un data center ?

Un centre de traitement des données est une sorte de ferme d'ordinateurs sécurisée qui stocke et traite les milliers de données des entreprises. Le bâtiment est constitué́ d’un espace sécurisé dont l’alimentation télécom et en énergie est redondée afin d’assurer une très haute disponibilité́ des ressources informatiques. Vu de l'extérieur, un centre de données ressemblerait donc à un entrepôt ou à un local d'activité lambda. Mais dans la réalité, il s'agit d'une infrastructure très complexe qui assure quatre fonctions principales :

  • La disponibilité électrique

C'est l’une des fonctions les plus critiques du data center car elle répond aux besoins de puissance et de stabilité requis par les équipements informatiques. L’alimentation électrique doit garantir un apport en énergie de haute-qualité et en quantité suffisante. En cas d'incident, l'infrastructure doit pouvoir garantir une production d'électricité autonome.

  • Les systèmes de refroidissement

L’énergie électrique consommée par les équipements informatiques est presque intégralement convertie en chaleur. Un système de conditionnement d'air est donc requis pour refroidir les serveurs, les baies et les salles.

  • Les équipements informatiques

Un data center abrite un grand nombre d'armoires communément appelées baies destinées aux serveurs d'application et de stockage et aux équipements de réseau.

  • La sécurisation de l’environnement

La sécurité du bâtiment et des équipements doit être assurée par un gardiennage 24 heures/24, des technologies d'authentification et bien sûrs des systèmes d'alerte en cas d'incidents.

Comment les data centers sont-ils classifiés ?

Un consortium d’entreprises baptisé Uptime Institute a développé un système de classification appelé Tier qui représente globalement le niveau de garantie de la sécurité de l’information. On recense quatre niveaux de Tier (même si les niveaux I et II ne sont guère plus utilisés) :

  • Tier I :

Le centre de données est équipé d’une seule alimentation électrique, sans aucune redondance. Le taux de disponibilité moyen est de 99,67 % (soit 28 heures d’arrêt cumulé annuel).

  • Tier II :

Tous les équipements du data center sont redondés pour éviter tout arrêt de fonctionnement. On parle alors de data center maintenable sans coupure. Taux de disponibilité : 99,741 %.

  • Tier III :

Tous les composants sont redondés et de multiples chemins de distribution existent. Tout le matériel informatique est à double alimentation. Taux de disponibilité : 99,982 % (soir 1,6 heure d’interruption cumulée par an).

  • Tier IV :

Ce niveau correspond à un data center dit résilient (ou tolérant) à la panne. L’infrastructure est intégralement redondée. Le taux de disponibilité est de plus de 99,99 % (soit moins de 24 minutes d’arrêt cumulé annuel). 


La majorité des entreprises qui externalisent leur data center recherchent une infrastructure de classe Tier III.

La classe Tier IV est plus généralement destinée au secteur de la finance ou encore à la Défense.

L'efficience énergétique : un critère-clé pour les preneurs

Parmi les critères de choix des entreprises qui externalisent leur data center (outre l'accessibilité ou l'état des installations et du bâti), l'efficience énergétique représente un élément-clé. Car, le numérique a lui aussi une empreinte énergétique : en France, la consommation des data centers s'élevait en 2015 à environ 3 TWh, l'équivalent de la consommation électrique de Lyon. Autre fait marquant : selon le Groupement des industries de l’équipement électrique, les systèmes de refroidissement représentent près de 49 % de la facture énergétique globale d’un data center.

Conscients de ces enjeux, les exploitants de data centers travaillent sur la question de l’efficience énergétique. Un nouvel indicateur a ainsi été mis en place pour définir le niveau de performance énergétique d'un data center. Le PUE (Power Usage Effectiveness) s'appuie sur un ratio calculé à partir de l'énergie totale consommée par le data center (climatisation comprise) et l'énergie uniquement consommée par les serveurs. Plus le chiffre est proche de 1, plus le rendement est bon. Les data centers les plus efficients du marché affichent aujourd’hui des PUE inférieurs à 1,3.

Afin de tendre vers des data centers encore plus performants, plusieurs solutions sont actuellement expérimentées. Facebook traite ainsi une grande partie de ses requêtes en Suède, à quelques kilomètres du cercle polaire. Le géant Microsoft teste quant à lui l'immersion de ses serveurs en mer d'Écosse. Xefi refroidit les siens en Savoie grâce aux eaux du lac du Bourget.

 La récupération de la chaleur est également source d'expérimentations : à Châteauroux, le projet Green Challenge 36 prévoit la création (d'ici 2023) d'un data center de 12 000 m², alimenté par de l'énergie solaire. Les serveurs chaufferont des serres et déshydrateront de la luzerne pour les éleveurs.

Les data centers : un actif immobilier alternatif

Jusqu'à présent, on distinguait deux modèles principaux : les entreprises informatiques ayant investi dans les bâtiments existants ou conçus sur mesure pour le traitement de leurs données et les grands comptes (banques, assurances) qui construisent leurs propres data centers.

Or avec la croissance du numérique, ces réseaux se sont complexifiés, augmentant le niveau d'exigence en matière de sécurité et de disponibilité des data centers. Et c'est aux États-Unis, au début des années 2000, que l’on a vu émerger ce mouvement d’externalisation, les entreprises se délestant de leurs centres de stockage auprès de spécialistes (fournisseurs d’hébergement en colocation ou en gros). Cette part devrait atteindre 50 % en 2020. Le marché ainsi représenté par les investissements dans les terrains, les bâtiments ou encore les infrastructures devrait atteindre 80 milliards de dollars d'ici à 2020.  

Selon une étude Broad Group, le marché du data center en France (qui représente le troisième en Europe) devrait enregistrer une croissance de 20 % d’ici 2020, tirée par les Big Five du Cloud, notamment Microsoft et Amazon Web Services qui se sont implantées en France après Salesforce et IBM/Softlayer.

Présent dans toute la France

À ce jour, on compte près de 200 data centers en France. Or, si la région parisienne concentre actuellement plus de 80 % de l'offre (Microsoft, Google, IBM, Amazon Web Services Equinix, Interxion, etc.) un nouveau marché émerge en régions, avec des opérations de taille plus modeste tels que TDF qui développe des projets à Bordeaux, Marseille, Lille et Rennes, Sigma Informatique à Nantes, PebsCo à Brest, Jaguar Network à Marseille ou encore DCforData à Lyon. Ce dernier a ouvert au printemps dernier un data center de 3 600 m² dans le 8ème arrondissement pour un budget de 20 millions d’euros. Toujours à Lyon, Euclyde a inauguré un data center de 3 000 m² en plein cœur de Lyon pour un investissement de 6 millions d’euros.

Ainsi, à la faveur de rendements élevés (les loyers atteignant cinq à dix fois le niveau des loyers de bureaux) le nombre d'investisseurs sur le marché du data center devrait augmenter dans les prochaines années, porté par des perspectives attrayantes. Il ne faudra cependant pas omettre le risque à la revente qui reste marqué, le data center étant, par nature, spécifiquement conçu sur mesure pour les entreprises utilisatrices.

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