L’immeuble Génération, un projet qui a pris naissance en 2018, symbolise aujourd’hui le renouveau tertiaire de la Plaine Saint-Denis. Conçu par l’atelier d’architecture Chaix & Morel et associés, sous la direction de Rémy Van Nieuwenhove et géré par La Française Real Estate Managers pour le compte de Baumont Capital, il module les espaces de travail et de vie au profit des nouveaux enjeux des utilisateurs. Véritable défi tant par sa conception sur une parcelle exigüe que par son implantation faisant la jonction entre un quartier résidentiel et le quartier des affaires, Génération s’inscrit dans un quartier stratégique du Grand Paris.

Le résultat ? Un bâtiment nouvelle génération, tout en transparence, qui permet de faire le lien entre différents acteurs du territoire. Entretien Avec deux des architectes du projet, Anabel Sergent et Cécile Rivière.

Quels étaient les atouts et les contraintes pour la conception du bâtiment ?

 

Cécile Rivière & Anabel Sergent : La parcelle sur laquelle le bâtiment Génération est implanté est très exigüe. Cette caractéristique a orienté notre manière de concevoir le bâtiment. Nous avons souhaité l’ouvrir au maximum pour qu’il soit aussi accessible depuis l’extérieur et pour lui apporter ampleur et luminosité. La contrainte a été tournée en avantage : elle permet une transparence totale à rez-de-chaussée, ce qui n’est pas possible lorsque les bâtiments sont plus étalés.

L’urbaniste de la ZAC avait donné deux règles pour la conception : rentrer du côté de la gare avec une grande percée visuelle sur le cœur d’ilot, et en créer une seconde au sud. Nous avons donc essayé de créer le plus de fluidité possible entre l'intérieur et l’extérieur. L’occasion aussi de faciliter les parcours au sein du bâtiment.

Comment « ce vaisseau glissant dans la ville » s’intègre-t-il au reste du quartier ?

 

Le site est le point de départ du programme : le terrain triangulaire sur lequel le bâtiment est implanté est à l’articulation entre la partie tertiaire et la partie logement de la ZAC Cristino Garcia. La partie tertiaire autour bâtiment est très haute, les gabarits importants, avec une écriture architecturale aux lignes horizontales. De l’autre côté, se trouve le quartier résidentiel, en partie rénové, mais il subsiste néanmoins des maisons avec jardins. Lier ces deux environnements, faire la transition avec une écriture architecturale spécifique, était fondamental. Nous avons réussi à adresser le bâtiment vers la gare Plaine Saint Denis du RER B dont nous sommes très près, tout en donnant envie d’aller dans le bâtiment depuis la gare.

C’était comme un puzzle auquel il manquait la pièce centrale : le bâtiment Génération vient articuler ces trois zones.

Quel parti-pris esthétique avez-vous choisi pour ancrer ce bâtiment entre la zone résidentielle et le quartier d’affaires ?

 

Nous avons privilégié la transparence en rez-de-chaussée, tandis qu’en étage nous avons travaillé essentiellement des baies verticales afin de faire écho avec les logements. A l’aide d’un artifice de shadow-box, on donne à lire trois registres en double hauteur et non six niveaux, ce qui assure la transition douce avec le secteur résidentiel. Pour animer le bâtiment et le rendre le plus léger possible, nous avons choisi une vêture métallisée et claire qui change au fil de la journée, avec le soleil et la couleur du ciel.

Les façades sont ponctuées de loggias en biais, orientées vers les proues du bâtiment. Cette écriture donne lieu à des irrégularités volontaires, au-delà desquelles on peut imaginer des espaces de rassemblement et d’échanges informels, on donne à lire trois registres en double hauteur et non six niveaux, ce qui assure la transition douce avec le secteur résidentiel.

En quoi le bâtiment Génération est-il si particulier ?

 

Sa forme resserrée de plateau n’est pas habituelle comme celle des bâtiments organisés sur une trame orthogonale. Du fait des biais successifs, de l’emprise au sol, les perspectives ne sont pas les mêmes et selon notre emplacement dans le bâtiment, les vues sont très différentes et variées : l’îlot est cerné d’un voisinage très varié avec des vues lointaines sublimes comme la Tour Eiffel, le Sacré-Cœur ou encore le canal Saint-Denis, et bientôt le village olympique qui est en chantier.

La façon d’habiter cet espace de travail devrait être très intéressante, il accompagne la façon dont le travail évolue.

Vous avez particulièrement travaillé les espaces communs dans ce programme, comment les avez-vous pensés ?

 

En effet, plutôt que par les plateaux de bureaux, c’est par ses zones communes (dont une salle de Fitness, une salle Arena pouvant accueillir tout type d’événement, un local à vélo) et ses espaces de services en rez-de-chaussée, et en terrasses, que le bâtiment se distingue. C’est un espace conçu pour vivre ! En bas, le restaurant est tout en transparence, on y est complètement perméable à l’extérieur : ça donne envie de s’y installer.

Le clou architectural de Génération est la séquence d’entrée, la distribution en étages et l’espace d’accueil. Il est vraiment particulier, car nous avons réussi à proposer deux corps de bâtiment qui avancent vers la gare, et accueillent les visiteurs. Entre les deux, nous avons situé le hall, en double-hauteur. Au-dessus de celui-ci, des « loges » vitrées en double hauteur également, distribuent les plateaux, parcourues par les escaliers ouverts qui offrent des circulations verticales très fluides.

En quoi, selon vous, le nom « Génération » incarne-t-il le bâtiment ?

 

Nous avons changé de génération de bâtiment tertiaire ! La proportion de vide et de plein en façade offre un bon confort d’été. L’immeuble offre de nombreux espaces extérieurs, enfin devenus incontournables.

Il y a également tous ces accès à l’extérieur, devenus indispensables. Chacune des façades bénéficie d’un balcon ou d’une terrasse, avec des prises électriques et des bancs qui permettent de travailler différemment.

 

A l’intérieur, quels matériaux ont été utilisés ? Pourquoi ce choix ?

 

Pour les parties communes, nous souhaitions une continuité de traitement des matériaux et de l’aspect entre le rez-de-chaussée et les étages. Entourées d’un bois très doux qui accueille à tous les niveaux, les parties communes sont clairement identifiées et identifiables. En façade des paliers d’ascenseur, il y a un carrelage clair, qui rappelle la pierre, et renforce l’atmosphère paisible des espaces.

Les parties restaurant et café lounge sont dans la continuité du hall, le bois est cette fois au plafond, avec des lames lumineuses en quinconce. La moquette vient renforcer le côté cosy de ces espaces, il y a un côté club anglais moderne chic. L’ambiance est reposante pour les utilisateurs. Néanmoins, il y a aussi des touches de couleurs, comme un jaune tournesol qui amène de la lumière, un côté joyeux. Ces jeux de couleurs dialoguent avec la végétation présente à l’extérieur du bâtiment.

La nature semble avoir toute sa place dans ce programme. Comment la végétalisation a-t-elle été pensée ?

 

L'îlot est resserré, donc le jardin intérieur du rez-de-chaussée est assez minimal. En revanche, la nature explose en hauteur. Le jeu de terrasses végétalisées se fait sur les 5ème, 6ème et 7ème étages, nous avons même ajouté de la végétation sur la dernière terrasse technique du 8ème. Lorsque l’on arrive de la gare, la vue sur cette proue végétalisée est prenante ! Les terrasses ont 50 cm de terre, une belle profondeur qui permet de faire pousser des arbres de plus de 2 mètres de hauteur. Notre paysagiste a travaillé à renforcer la biodiversité du site, en jouant aussi sur des strates différentes : des plantes vivaces, des rampants, des arbres à feuillage persistant, d’autres qui fleurissent en été. Pour encourager la nature à s’y développer, nous avons ajouté des hôtels à insectes et des nichoirs. Un espace de terre a été laissé libre : les utilisateurs pourront créer leur propre potager s’ils le souhaitent.

La préservation de la biodiversité et la durabilité sont également des critères de premier plan. En quoi Génération est-il un bâtiment respectueux de l’environnement ?

 

Le bâtiment Génération a reçu plusieurs labels : il a la certification HQE Excellent, BREEAM Excellent, Effinergie et R2S (Ready2Services).

Aujourd’hui, l’immobilier de bureau neuf est à la modularité et à la réversibilité. Pouvez-vous nous décrire le travail qui a été fait sur ce point essentiel ?

 

Nous avons voulu travailler sur des espaces épurés afin qu’ils soient modulables au maximum. L’immeuble permet un cloisonnement tous les 135cm, avec fenêtre sur deux ouvrante en façade, pour la ventilation naturelle de tous les bureaux. Lorsque les plateaux ne sont pas cloisonnés, on bénéficie de trois open-spaces distincts par niveaux, qui sont facilement réunis en cas de croissance des entreprises, y compris avec les plateaux supérieurs et inférieurs.

Nous avons aussi inclus des loges tous les deux niveaux, ce sont des espaces que les utilisateurs peuvent s’approprier, et ils devraient certainement être attribués en pôles collectifs d’accueil, de réunion, d’espaces servants de nouvelle génération.

Le jury, dont vous étiez membre, a sélectionné l’œuvre d’art qui figure dans le hall principal. Comment dialogue-t-elle avec le bâtiment ?

 

En effet, c’était un concours initié par Manifesto (Créateur de projets artistiques et culturels) et la ville de Saint-Denis, auquel plusieurs artistes locaux ont participé. Nous leur avons confié les plans et la maquette… et chacun a réagi au bâtiment. Au terme du concours, le maître d’ouvrage, Manifesto et nous les architectes, nous avons choisi l’œuvre qui nous semblait la plus à destination des riverains et des utilisateurs, la plus intégrée au bâtiment, tout en faisant signe à l’échelle du territoire, s’adressant à la gare notamment. De fait, cette œuvre, de l’artiste dionysien Paul Créange, en matériaux recyclés est complètement liée à la conception du bâtiment : les tubes lumineux courbés viennent dialoguer avec les compositions verticales et simples et envoient de la lumière mouvante au milieu de ces grandes lignes de verre.

Elle ajoute un caractère ludique qui twiste le côté tertiaire, les photographies faites par les enfants du quartier avec l’artiste lors d’un atelier de création sont intégrées dans l’œuvre lumineuse. Le territoire est invité même dans l'œuvre, les habitants peuvent très bien considérer qu’elle leur appartient. Nous revenons sur cette notion d'ouverture et de partage.

Le programme permet-il donc, dans une certaine mesure, d’inclure les riverains ?

 

Nous avons en effet souhaité que l’œuvre d’art de Paul Créance qui figure dans le hall soit visible de tous depuis l’extérieur. Puis, il y a ce mail piéton très vivant, la mairie l’a végétalisé et y a installé des infrastructures, c’est un lieu de vie avec beaucoup d'enfants. Il permet de mélanger les publics, d’amener la vie de quartier entre les immeubles de bureaux, et de mêler les générations.

Architecte : Agence Atelier d’architecture Chaix & Morel et associés
Crédits photos : Agence 11h45 

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