Malgré une conjoncture incertaine – marquée notamment par une croissance économique faible voire nulle pour le premier semestre 2023 en France, une inflation et des taux directeurs [1] élevés, un pic de l’IRL [2] attendu fin 2023 et l’augmentation des coûts de construction, des énergies et des matières premières –, le marché du résidentiel dans son ensemble [3] demeure toutefois l’une des classes d’actifs les plus résilientes. S’il est vrai que le pouvoir d’achat immobilier des ménages est impacté à la baisse, nous assistons structurellement depuis plusieurs trimestres au retour des investisseurs institutionnels sur le résidentiel et l’hôtellerie – représentant près de 20 % du portefeuille immobilier global en France selon MSCI, soit une croissance constante depuis 2017. Retour sur les grands marqueurs du marché résidentiel et projections sur les grandes tendances et enseignements.

Marché résidentiel ancien en France

Prix en baisse mais les rendements locatifs augmentent

 

Après un pic d’1 200 000 transactions de logements anciens en France atteint à la mi-2021, nous sommes au premier trimestre 2023, sur 12 mois glissants, à 1 069 000 transactions. Malgré cette baisse de 10% sur un an, le nombre de transactions reste supérieur à la moyenne des 10 dernières années, qui est de 888 000 transactions [1].

Cette baisse des transactions s’explique notamment par la hausse des taux d’intérêt qui réduisent le pouvoir d’achat des ménages et les capacités d’investissement. Par exemple, pour une mensualité de 1 000 € par mois avec les 4 % de taux d’intérêt actuels, la capacité d’emprunt sur 20 ans est impactée de -23 %. « Les conséquences des difficultés de l’obtention des crédits se feront beaucoup plus sentir sur le second semestre 2023 », fait savoir Jean-François Morineau, Directeur Général Délégué Résidentiel et Hospitality chez BNP Paribas Real Estate.

En conséquence, les prix des logements anciens décélèrent globalement au premier trimestre 2023, sur 12 mois glissants, dans l’Hexagone. C’est notamment le cas à Paris (10 310 €/m²) [2], Lille (3 762 €/m²) et Lyon (5 215 €/m²) [3]. Toutefois, la majorité des agglomérations françaises affichaient encore des hausses à cette même période, comme Marseille (3 668 €/m²), Toulouse (3 883 €/m²), Nantes (4 319 €/m²), Strasbourg (3 957 €/m²) ou Nice (5 103 €/m²). Par ailleurs, malgré quelques inflexions liées à la conjoncture, le prix moyen du marché de l’immobilier ancien reste en forte augmentation depuis 2009 dans toutes les principales villes de France : soit d’environ 30% à Marseille, 40% à Toulouse, 65% à Paris et 80% à Strasbourg.

Enfin, si les rendements locatifs dans le marché de l’ancien sont globalement en baisse depuis plus de 10 ans dans les principales métropoles françaises, nous pouvons souligner leur hausse entre 2021 et 2023. Seule la capitale subit une variation négative pour un rendement locatif estimé à 2,8% au T1 2023. « La baisse de rendements constatés sur Paris n’est pas le reflet de la baisse des prix des logements. Nous devrions rapidement passer à Paris au-delà des 3% de rendement. Quant aux grandes capitales régionales, celles-ci sont soit stables soit en hausse, avec des prix métriques légèrement en baisse et un marché locatif légèrement en hausse », analyse Jean-François Morineau.

Marché de l’investissement résidentiel en France

Evolution de la typologie d’investisseurs

 

À l’instar de la baisse de 88 % du montant investi dans le résidentiel strict en France entre le T1 2023 (321 millions [1] et le T1 2022, la plupart des indicateurs d’investissements dans le marché résidentiel sont au rouge au T1 2023 en comparaison au T1 2022. Il est toutefois à noter que les prévisions d’investissements en immobilier sur l’ensemble de l’année 2023 sont plus importantes dans le résidentiel, qui représenteraient 22% de l’ensemble des classes d’actifs, contre 16% en 2022.

Contrairement aux autres classes d’actifs, le résidentiel intéresse toujours autant acheteurs et vendeurs. Seules les conditions du marché ont varié. Par exemple, un acquéreur en Bloc souhaite aujourd’hui une décote nettement plus importante par rapport à la Découpe qu’il y a un an. De même, dû aux conditions de financement plus onéreuses, l’acquéreur demande un rendement plus important sur un actif que les années précédentes. Sans oublier les normes environnementales qui ont un impact de plus en plus fort sur le prix et l’attractivité d’un actif.

Jean-François Morineau
Jean-François Morineau

La vraie bonne nouvelle est que l’immobilier résidentiel intéresse toujours les investisseurs. Mais la typologie d’investisseurs a changé en une année. Les principaux clients sont aujourd’hui les promoteurs et marchands de biens, les institutionnels classiques (les fonds, assureurs…), les opérateurs sociaux et intermédiaires, les grands fonds américains qui reviennent en force sur le marché.

Marché du résidentiel géré en France

Résidences seniors, étudiantes & coliving performent en 2022

 

Le marché de l’immobilier géré est resté performant en 2022 avec des volumes investis supérieurs à 1,2 milliard d’euros, et en croissance par rapport à 2021. C’est une nouvelle fois les résidences services seniors (RSS) qui ont tiré le marché et ainsi représenté 50 % des montants investis, avec 616 millions d’euros, suivies par l’étudiant, avec 316 millions d’euros, et le coliving.

33 transactions de RSS ont été recensées en 2022, dont 20 % portent sur des cessions de portefeuilles de 2 ou 3 actifs (Aquarélia et Steva), et près de 70 % des montants investis le sont sur des résidences en région. Concernant le profil des investisseurs, si les fonds étrangers sont de plus en plus présents sur le marché des résidences seniors, les acteurs français en restent les principaux protagonistes (caisses de retraite et mutuelles, SCPI, etc.).

En 2022, les investissements en résidence étudiante ont retrouvé leur niveau de 2020. Des volumes en hausse qui s’expliquent par des montants unitaires de transaction plus importants. En effet, si l’on regarde de plus près, on constate une baisse du nombre de transactions depuis 2018 liée entre autres à une offre limitée, à la croissance du coliving mais aussi à la concurrence de la vente à la découpe, plus forte, sur le segment.

De son côté le coliving a confirmé en 2022 pour la 2e année consécutive sa place dans le résidentiel géré avec près de 300 millions d’euros investis et 14 transactions, dont plus de la moitié en Ile-de-France. Une année 2023 qui s’annonce très bien pour le coliving puisque cette classe d’actif a représenté près de 80 % des volumes investis en immobilier géré au 1er trimestre 2023.

… et font preuve de résilience en 2023

Ce qui confirme l’intérêt des investisseurs pour ces actifs

 

« Comme pour les années précédentes, le marché reste limité par un manque d’offres et ce malgré de forts besoins des populations cibles de ces résidences. Il reste tributaire des développements de nouvelles résidences, les VEFA ont ainsi représenté 84 % des transactions », explique Christelle Beaussier, Directrice Résidences Services chez BNP Paribas Real Estate.

Concernant ce début d’année, comme pour les autres classes d’actifs mais de façon plus modérée, on constate une baisse des volumes investis de l’ordre de 51 % au T1 2023 par rapport au même trimestre l’année précédent. L’immobilier géré représente cependant près de 40 % des volumes investis en résidentiel au 1er trimestre 2023, contre 27 % en 2022. Ce qui confirme bien l’intérêt des investisseurs pour ces actifs, selon une stratégie de diversification.

Les résidences seniors (15 millions d’euros engagés) et les résidences étudiantes (26 millions d’euros) ont réalisé des performances plutôt décevantes en ce début d’année. A l’inverse le coliving a été particulièrement dynamique avec 6 transactions pour un montant global de 157 millions d’euros, et représente près de 80 % des volumes investis au 1er trimestre 2023.

Marché hôtelier en France

Surperformances attendues en 2023 et 2024

 

2022 confirme la reprise de l'activité avec un RevPAR [1] 2022 supérieur de 86,3 % [2] par rapport à 2021 et supérieur de 7 % par rapport à 2019. Dans un contexte inflationniste, ce résultat est largement porté par la hausse du prix moyen observée en 2022 (13,6 % par rapport à 2019) tandis que le taux d'occupation reste en retrait de 4,1 points par rapport à 2019.

Des disparités existent selon l’emplacement géographique et la catégorie. Paris, Lyon, Nice et Marseille affichent les plus fortes progressions, notamment portées par l’augmentation de leurs prix moyens. Par catégorie, la tendance se confirme avec une hausse de l’ensemble des prix moyens selon les différentes catégories : très forte augmentation de 24,9 % sur la catégorie luxe, augmentation légèrement supérieure à 10 % sur les autres catégories (+ 12,6% pour le budget, + 11,1 % pour l’économique et + 13,9 % pour le moyen de gamme).

« Les performances arrêtées à avril 2023 permettent d'observer le maintien de cette hausse des prix moyens avec + 19,6 % comparé à avril 2022. Les quatre premiers mois de l'année semblent aussi témoigner d'un retour de la fréquentation sur la destination France avec un taux d'occupation supérieur de + 8,4 points sur la même période. La coupe du monde de Rugby et les Jeux olympiques, qui ont un fort impact sur une courte durée, nous amène à prévoir une deux très belles années », analyse Francis Assenat, Consultant Senior Hôtel pour BNP Paribas Real Estate.

Enfin, le marché hôtelier en France a dépassé en 2022 sa moyenne décennale après deux années de baisse. Ainsi, plus de 2 milliards d’euros ont été transactés l’année dernière. Avec une répartition géographique toujours autour de 50 % à Paris et 50 % en Province. Le premier trimestre de l’année 2023 confirme cette reprise en forte hausse par rapport au trimestre dernier, pour atteindre près de 600 millions d’euros d’investissements.

Malgré le contexte morose, de nombreux investisseurs institutionnels souhaitent diversifier leurs portefeuilles. Cette diversification dans les actifs immobiliers en faveur de l’hospitality au sens large est somme toute logique. En effet, des critères invariables sociodémographiques et propres à l’immobilier portent le résidentiel. Hausse de la population, accélération de la décohabitation, augmentation du nombre de ménages, vieillissement de la population pour l’immobilier géré ; sous offre structurelle dans les zones tendues, production de logements structurellement faible face à la demande, stabilité des valeurs locatives, granularité des locataires côté investissement… font de l’immobilier au sens large une classe d’actif résiliente et d’avenir.

Sources :

[1] Taux directeur : taux d'intérêt fixé par une institution financière relative à un pays ou à un groupe de pays.
[2] IRL : Indice de Référence des Loyers
[3] Englobe le résidentiel classique, intermédiaire et géré (résidence senior, étudiante et coliving)
[4]  IGEDD d'après DGFiP (MEDOC) et bases notariales
[5] Notaires du Grand Paris
[6] LPI – Les Prix Immobiliers
[7] Immostat, BNP Paribas Real Estate
[8] RevPAR : Revenue Per Available Room en anglais ; Revenue par chambre disponible en français.
[9] MKG

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