À l’occasion des « Rencontres bureaux Île-de-France » organisées ce mardi 19 juillet 2022 par BNP Paribas Real Estate, Éric Siesse, Directeur Général Adjoint Transaction France – Directeur du Pôle Bureaux Location IDF et toute son équipe ont analysé les chiffres du marché des transactions de bureaux dans Paris et sa région depuis le début de l’année. L’année 2021, encore empreinte de la crise sanitaire de covid-19, avait largement rebattu les cartes du marché. Mais 2022 semble dessiner un retour à la normal, « ou plutôt même une nouvelle normalité », selon les mots d’Éric Siesse. Retour sur les grands enseignements de cette conférence.

 

Les bureaux franciliens s’adaptent aux nouvelles attentes des utilisateurs

L'immobilier au cœur de la stratégie des utilisateurs

 

À la suite de la crise sanitaire, les utilisateurs ont définitivement été convaincu de repenser leur stratégie immobilière et de s’engager dans une logique de « change » pour s’adapter aux nouveaux usages et aux nouvelles façons de travailler.

LA RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises), la centralité, l’hybridation des modes de travail sont désormais trois enjeux devenus clefs pour les entreprises. Perceptible depuis 2021, l’essor de ce triptyque se confirme bel et bien en 2022 et constitue à la fois un relai de croissance et le socle d’une nouvelle normalité. 

Eric-Siesse-portrait
Eric Siesse, Directeur Général Adjoint Transaction France
Directeur du Pôle Bureaux Location IDF

En effet, malgré les turbulences géopolitiques liées à la guerre en Ukraine et aux incertitudes économiques qui en découlent, matérialisées notamment par une forte inflation en France (+5,5% attendus fin 2022), la dynamique du marché des bureaux franciliens répond à l’appel.

La demande placée à fin juin 2022 renoue avec sa moyenne décennale, en progression de 24% par rapport à 2021. Les perspectives d’atterrissage sont donc revues à la hausse avec plus de 2,3 millions de m² attendus en fin d’année. Cette activité reste cependant inégale selon les secteurs géographiques : le désir de centralité reste un marqueur fort du marché locatif francilien, ce qui peut être aisément illustré par les surperformances de Paris QCA (Quartier Central des Affaires) et de La Défense depuis deux ans.

Autre bonne nouvelle, l’offre à un an se stabilise mais demeure à un niveau élevé. 5,6 millions de m² restent disponibles en Île-de-France au 1er juillet 2022, dont 1,8 million de m² dans le neuf. La vacance immédiate se stabilise également à 7,4% au 2ème trimestre 2022 mais elle est toujours très hétérogène, avec là aussi de fortes disparités géographiques.

Les loyers exercés sont également sujets à de forts écarts, l’évolution des valeurs locatives tenant fortement compte de la confrontation entre l’offre et la demande. Les quartiers parisiens centraux les plus prisés ont encore des perspectives haussières dans les mois à venir.

 

2021 aura été l’année des réflexions immobilières et de la construction des politiques de télétravail au sein des entreprises. 2022 est celle de la mise en place et du déploiement de nouvelles expériences pour les collaborateurs, ce qui peut expliquer la forte dynamique que connaît le marché de bureaux franciliens actuellement. La transformation touche toutes les entreprises, nous accompagnons une centaine de projets qui concernent aussi bien des PME que des groupes du CAC 40 dans des secteurs d’activités aussi divers que variés. Nous sommes en train de vivre un tournant : jamais l’immobilier n’a été aussi stratégique et au cœur des décisions d’entreprise !

Cécile Raynier
Directrice Adjointe Workplace & Change Management

Les grandes surfaces ont le vent en poupe, boostées par 5 « giga deals »

Les écoles sont également à la manœuvre sur le marché

 

Si les grandes surfaces supérieures à 5.000 m² avaient été les plus impactées par la crise sanitaire, la tendance s’est désormais totalement inversée, avec un effet rattrapage amorcé en 2021 qui s’est donc accéléré cette année.

À fin juin 2022, BNP Paribas Real Estate Transaction France décompte déjà 28 opérations en Île-de-France, dont 16 situées sur Paris et La Défense, pour un volume de 328.000 m² placés, en progression de 38% sur un an. La demande placée de ces grandes surfaces devrait ainsi dépasser les 800.000 m² en fin d’année, pour arriver à environ 65 à 70 opérations.


 

Cette belle dynamique est essentiellement portée par deux moteurs : la révolution des organisations, qui contraint les utilisateurs à transférer leur siège vers des immeubles techniquement flex-compatibles ainsi que le fort besoin de centralité avec un mouvement de fond vers des secteurs plus établis, mieux connectés et disposant d’un vrai agrément de vie de proximité. 

Eric Beray
Éric Beray
Directeur associé du Département Grandes Opérations IDF

Le marché des grandes surfaces a également été porté par 5 très grosses opérations de plus de 20.000 m² placés, que l’on appelle des « giga deals ». Le secteur public et parapublic est fortement représenté au sein de ce marché avec des transactions pour deux ministères (celui de l’intérieur à Romainville et celui des solidarités et de la santé à Paris 15ème), mais aussi avec les signatures d’ENEDIS sur Altiplano à La Défense et de GRDF à Saint-Denis, deux entreprises détenues par l’État. Enfin, ARKEMA s’installera à La Défense sur Light Well.

Au regard des négociations en cours, cinq à six nouvelles transactions de plus de 20.000 m² devraient être également se signer d’ici la fin de l’année. Là encore, le secteur public et parapublic devrait être particulièrement mis en avant grâce au deal attendu du Ministère de l’intérieur encore lui sur les 46.000 m² d’Universeine à Saint-Denis, mais aussi à la VEFA de l’Agence Française de Développement (AFD) sur la gare d’Austerlitz dans le 13ème arrondissement (50.000 m²). Enfin, le regroupement de Bouygues Telecom est attendu sur l’Ile Seguin pour 70.000 m² placés.

Autre tendance du marché des grandes surfaces, BNP Paribas Real Estate constate que la bonne activité des Écoles se confirme encore cette année, avec pas moins de 4 transactions au 1er semestre sur l’Ouest parisien. L’Institut Catholique de Lille s’installe au V-So à Issy-les-Moulineaux (6.400 m²), l’IESEG (6.200 m²) et L’ICN (7.200 m²) vont découvrir Les Collines de l’Arche à La Défense et le Réseau Compétences et Développement va prendre ses quartiers sur une opération clé en main réalisé par Baumont et Valream à Courbevoie (10.000 m²).

Les investisseurs, longtemps réticents à faire les efforts nécessaires pour adapter leurs immeubles en ERP (Établissement Recevant du Public), se montrent à présent très proactifs. Le grand mouvement de concentration des écoles représente une réelle opportunité commerciale pour des opérations situées dans des environnements les plus concurrentiels

Eric Beray
Éric Beray
Directeur associé du Département Grandes Opérations IDF

Les entreprises en recherche de « centralité locale »

Les autres tendances du marché

 

Contrairement aux idées reçues, et malgré les surperformances des secteurs de Paris QCA et de La Défense, nous n’assistons pas à un exode massif des entreprises dans Paris intramuros. Seules 4% des transactions parisiennes supérieures à 1.000 m² proviennent d’utilisateurs exogènes, contre 10% en 2019.

Malgré quelques contre-exemples, comme celui de la société CISCO qui va quitter ses 11.000 m² à Issy-les-Moulineaux pour s’installer rue Washington à Paris 8ème pour moins de 6.000 m², nous observons sur le terrain que les entreprises, plus que la quête du « Paris à tout prix », sont le plus souvent à la recherche d’une centralité locale, c’est-à-dire qu’elles sont dans l’optique de se déplacer vers le cœur de leur zone géographique d’origine. 

Loïc Cuvelier
Loïc Cuvelier
Directeur du Département Bureaux Grandes Opérations IDF

Cette mobilité géographique en plein cœur de la même zone présente 3 avantages. Les entreprises peuvent gagner en image et en notoriété grâce à une localisation plus centrale, elles bénéficient d’une meilleure attractivité RH grâce à une meilleure accessibilité et des habitudes des collaborateurs déjà en place moins bouleversées, et enfin elles sont gagnantes sur le plan économique, grâce à une stratégie de flex-office.

En effet, le flex-office qui permet notamment aux salariés une alternance entre présence sur site et travail à la maison, offre la possibilité aux entreprises d’opérer au « resizing » de leurs bureaux, c’est-à-dire qu’elles peuvent bénéficier de bureaux mieux localisés et plus adaptés aux nouveaux usages, tout en maitrisant leurs coûts grâce à une surface plus petite. En moyenne, les entreprises réduisent leur emprunte immobilière de 30%, mais cela peut même aller jusqu’à 50%, notamment dans les secteurs de la Banque-Assurance, mais aussi au sein des ESN et du Conseil.

 

Ces opportunités de mobilité géographique locale ont déjà séduit cette année plusieurs entreprises. Dans l’ouest parisien, les sociétés Worldline et ARKEMA ont récemment déménagé respectivement à la Tour Voltaire et dans l’immeuble Lightwell, alors qu’elles étaient précédemment installées en Péri-Défense. Dans le sud, Altran qui était domicilié à Velizy en deuxième couronne a plié bagage pour Meudon Campus, et même dans Paris, la société Digital Classifieds va quitter le 18ème pour poser ses valises en plein cœur du 9ème arrondissement, boulevard des Italiens. 

Loïc Cuvelier
Loïc Cuvelier
Directeur du Département Bureaux Grandes Opérations IDF

Des disparités selon les secteurs géographiques

Paris QCA et le quart nord-est au top

 

Comme évoqué précédemment, la zone Paris Quartier Central des Affaires se porte à merveille. Avec près de 7 millions de m², ce marché profond s’autoalimente naturellement, et réalise une belle performance en ce premier semestre 2022, en s’affichant en hausse de 25% par rapport à sa moyenne à 10 ans.  Le secteur financier reste le plus dynamique dans le secteur au 1er semestre, suivi par les sociétés de luxe. Parmi ceux qui ont animé le marché, peuvent être mentionnés Barclays qui a signé un bail sur l’avenue Hoche, un grand nom du luxe emménagera prochainement dans un immeuble de la rue d’Anjou et DIOR qui va prendre ses quartiers sur l’immeuble Galilée Vernet dans le 8ème arrondissement.

Mais à la fin de l’année, on peut parier que ce sont les opérateurs de coworking qui seront les plus gros consommateurs de m², compte tenu de la dynamique de prise à bail qui est la leur. Morning et Deskeo prennent la tête du peloton, après une importante salve de transactions, avec toujours cette même stratégie de concentration sur le QCA pour densifier leur maillage. Les opérateurs sont très confiants dans leur croissance pour deux raisons : d’abord parce qu’on observe que les centres sont tous quasiment pleins mais surtout car la part que représente le coworking dans le parc QCA est estimé à 5 % alors qu’à Londres il est de 15 %, il reste donc beaucoup de marge.

Frédéric Godard
Directeur Associé Paris Quartier Central des Affaires.

Le marché de bureaux du Paris quart nord-est s’affiche également en très belle forme en ce premier semestre 2022, et cela se vérifie surtout sur les quatre arrondissements principaux. Les 3ème, 4ème, 10ème et 11ème arrondissements concentrent en effet 90% des transactions de ce secteur, qui double celles-ci par rapport à 2021 et qui fait même fois cinq par rapport à 2019. Autre fait notable, ce secteur historiquement endogène accueille désormais 30% de nouveaux entrants qui viennent de l’ouest parisien, grâce au grand retour des coworkers et des acteurs de « la tech », en recherche de nouveaux espaces flexibles.

Les nouveaux acteurs de livraison de courses ou de repas à domicile tels que Gorillas, Flink Goflink, Gopuff, Fritchi, Cajoo, les fameux dark stores, sont également présents en masse sur le secteur. Ils représentent environ une transaction par mois sur le ¼ nord est parisien. Ils consomment en moyenne 500 m² par site et s’intéressent à des locaux qui ne trouvaient pas preneurs, en revanche, ils assèchent terriblement certains quartiers en matières de commerce. Mais cette frénésie pourrait être ralentie par la mairie de Paris qui se charge de leur rappeler que leur activité n’est pas compatible avec une activité bureau ou commerce, et qui souhaite qu’ils s’installent uniquement dans des locaux d’activité…. Affaire à suivre. 

Fréderic Dos Santos
Frédéric Dos Santos
Directeur Associé Bureaux paris Nord et Est IDF

Le secteur de la Seconde Couronne Sud est quant à lui à la peine, avec des transactions divisées par deux en un an. Ce sont les Petites et Moyennes surfaces qui souffrent le plus avec seulement deux transactions alors qu’à l’inverse les Grandes surfaces surperforment avec déjà 4 transactions depuis janvier. La Première Couronne Sud est également en pause, car les grands utilisateurs du secteur tels qu’Orange, le Crédit Agricole ou encore Engie ont déjà fait leur révolution immobilière lors de la dernière décennie. En revanche, la Boucle Sud est en plein essor. Le quartier du trapèze à Boulogne-Billancourt est notamment devenu très attractif, grâce à sa qualité de vie, ses transports et sa future ligne 15.

Les immeubles de services tirent leur épingle du jeu sur ce secteur et représentent 90% des transactions au-dessus de 1.000 m². Ces immeubles séduisent les salariés en proposant une offre de services complète et repensée pour mieux répondre à leurs attentes. Et la grande nouveauté c’est que même les petits gabarits embarquent désormais des services, comme les 4000 m² du Boston à Issy les Moulineaux.

 

Marie Charra
Marie Charra
Directrice Centre de Profit Rive Gauche Sud Ouest

Quant au marché de Neuilly, il est actuellement en plein boom grâce à une offre de qualité et restructurée, qui ont permis 8 transactions de + plus de 1.000 m² depuis le début de l’année, au point qu’une pénurie de l’offre se profile. On peut imaginer un report sur la ville de Levallois ; qui attend une vague de 80.000 m² d’offres bien situées. Le secteur de La Défense attire toujours plus les entreprises, car il est un véritable accélérateur pour les marques employeurs des clusters industriels, énergétiques ou de conseil.

La Défense attire de plus en plus notamment car le territoire s’est métamorphosé passant du « big is beautiful » au «user centric» en devenant plus récréatif. L’after work continue de s’améliorer avec l’arrivée du Perchoir, de Mama shelter, et le verdissement du parvis de la fontaine Agame côté cœur transport au bassin de Takis coté esplanade. Enfin ce secteur gagne en fluidité d’accès et en perméabilité en abaissant ses ponts levis grâce à la création de 12 nouvelles passerelles, de rose de Cherbourg à la future passerelle de Neuilly.

 

Frédéric Blies
Frédéric Blies
Directeur Île-de-France Ouest

En conclusion, le marché de bureaux francilien affiche une très grande forme de résilience en ce début d’année 2022. L’exode promis par beaucoup en faveur des régions n’a finalement pas eu lieu et contrairement aux idées reçues, la recherche de centralité n’est pas que parisienne mais s’inscrit plus localement sur les marchés périphériques. Enfin, l’essor du flex-office et du principe de « moins de m² mais mieux de m² » permet au record des valeurs prime d’être battu cette année. La nouvelle normalité est aujourd’hui une réalité. 

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