Alors que les modes de consommation deviennent toujours plus collaboratifs et écoresponsables, la mobilité s’impose comme une considération à part entière pour repenser la ville de demain. En effet, les besoins des utilisateurs et des citoyens sont à l’origine de l’émergence de nouveaux usages et de nouvelles tendances de consommation de l’espace, qui viennent directement impacter l’aménagement urbain. Une tendance qui devrait encore se renforcer avec la crise sanitaire du COVID-19. Si l’espace public s’est vu réapproprié, l’actualité signe également le développement de la multi-modalité. 

La volonté des pouvoirs publics de développer et de favoriser les mobilités douces a amené les Métropoles à repenser l’organisation de leurs territoires et à développer des solutions alternatives, notamment en termes de mobilité. La crise sanitaire du Covid-19 pourrait encore accélérer la transition vers une mobilité plus douce.

Ainsi, le développement des voies cyclables et des vélos en ville ces dernières années est un signe qui ne trompe pas. À l’instar de l’explosion du covoiturage ou des offres de free floating, ces trottinettes ou scooters qu’on emprunte et libère quand et où on le souhaite, les nouvelles mobilités ont bouleversé nos habitudes de déplacement et nos modes de vie. Demain, l’agrégation des solutions de mobilité à travers l’expérience “Mobility as a Service” (MaaS) et les avancées technologiques autour du véhicule autonome créeront autant de nouveaux usages.

La mobilité au cœur des défis de notre société

 

Les mobilités urbaines sous-tendent les défis d’aujourd’hui et de demain. À l’image des changements sociétaux, elles sont le reflet de l’évolution des comportements de consommation : plus de partage et de recyclage des produits. Cette transition d’une économie de la propriété à une économie de la fonctionnalité consacre « l'usage en partage » selon l’économiste Yoann Sidoli(1). L’intérêt des usagers répond souvent à des considérations financières et de quête de sens. Ainsi, cette mutation vient bouleverser plusieurs domaines : le rapport à la propriété, le rapport au temps et le calcul de la valeur

La mobilité s’envisage ainsi de façon multisectorielle. Dans le secteur des transports par exemple : louer ponctuellement au lieu d’acheter un véhicule libère du pouvoir d’achat à court terme. Dans l’immobilier, cette tendance se développe également : le coliving s’envisage comme une réponse aux personnes « en transition » à la recherche de la solution la plus flexible possible, tandis que l’émergence des tiers-lieux offre une mixité des publics et des usages, à la fois en milieu urbain mais aussi rural.

Mobilité et congestion d’espace

 

Si ces solutions offrent des solutions concrètes de mobilité en ville, la multimodalité soulève de nouveaux enjeux, notamment environnementaux. La pollution de l’air dans les grandes villes demeure un sujet central, malgré une tendance baissière depuis une dizaine d’années. Plus d’un million de Franciliens sont ainsi exposés de manière chronique à des polluants comme le dioxyde d’azote, les particules fines PM2,5 ou l’ozone, à des taux très supérieurs aux recommandations de l’OMS(3)(Organisation Mondiale de la Santé). Autre problématique, le partage de l’espace urbain consacré à la mobilité. Les innombrables dégradations des flottes de véhicules et la question de leur emprise au sol sont devenues conflictuelles, à tel point que le législateur a dû adapter le Code de la Route en octobre dernier pour réguler leur utilisation et leur stockage, avec notamment l’interdiction de rouler ou de se garer sur les trottoirs sous peine d’amende. L’heure est désormais aux usages partagés, mais plus au détriment du piéton. Enfin les problèmes de congestion automobile dans les grandes villes sont loin d’avoir disparu. Ils sont même exacerbés en période de crise, comme lors des grèves de fin 2019, avec plus de 631 kilomètres de bouchons(4) recensés le 9 décembre en région parisienne.

Derrière les opportunités offertes par la multi-modalité se cache notamment la problématique de l’intermodalité: comment concilier les lieux et les usages? Car la mobilité, loin de ne considérer que les déplacements, recouvre également l’articulation entre la pratique des transports et ses finalités économiques, sociologiques et politiques. Il s’agit donc de traiter également la question de l’immobilité, c’est-à-dire les biens situés selon le géographe Jacques Lévy(5) : les sociétés, les villes, les bâtis. Dans une ville moyenne, on privilégiera une politique pour mieux lier la périphérie à l’hyper-centre, tandis que les métropoles favoriseront un maillage circulaire de l’agglomération pour délester les flux en centre-ville, le développement actuel du Grand Paris Express en étant l’illustration la plus probante.

Pour une mobilité toujours mieux partagée

 

Face à ces challenges et pour mieux se déplacer, dans une logique sanitaire, écoresponsable et durable, l’organisation des villes doit s’adapter et innover : adaptation des transports en commun, développement et régulation du free floating, des bornes de recharges électriques… Autre expérimentation grandeur nature dans le nord de la France : depuis plus d’un an, les 200 000 habitants de la Communauté Urbaine de Dunkerque (CUD) expérimentent la gratuité des transports en commun. Le résultat est à la hauteur de l’ambition du projet : « La gratuité a développé la mobilité », souligne Patrice Vergriete dans les colonnes du Parisien(6), Président de la CUD. En termes de lien social, de lutte contre l'exclusion, contre l'isolement des personnes âgées, la mesure a été très forte. Autre conséquence, la diminution de la pollution de l’air, liée en partie au report modal de la voiture vers le bus (+85 % en moyenne)(7). La mobilité constitue donc un élément permanent dans la réflexion de l’aménagement urbain et les projets immobiliers eux-mêmes intègrent une forte dimension mobilité : l’emplacement et la proximité des réseaux de transport en commun font partie des critères les plus importants.

La mobilité urbaine est un écosystème complexe en constante mutation. L’innovation technologique doit être employée comme un moyen de remettre le citoyen au centre des préoccupations, pour une ville où l'on respire mieux, circule mieux, et vit mieux. En associant et en consultant les citoyens, les riverains et les autres partenaires locaux dans les choix d’urbanisation, une multi-modalité plus douce prendra tout son sens en ville.

(1)Yoann Sidoli, sociologue : L’usage en partage : analyse comparative des modèles socio-économiques d’économie de la fonctionnalité et d’économie collaborative, 2017

(2) 77 % des personnes interrogées perçoivent l’intérêt économique du recours aux usages collaboratifs, INSEE 2013

(3) Bilan 2018 de la qualité de l’air en IDF : Airparif, 2019

(4) 631 kilomètres de bouchons à Paris : Le Parisien, 9 décembre 2019

(5) Jacques Levy, géographe : Penser la ville : une nécessité sous toutes les latitudes, 1997

(6) Verbatim Patrice Vergriete : Le Parisien, 29 septembre 2019

(7) Report modal de 85 % en moyenne : Le Monde, 4 novembre 2019

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